Le Kilimandjaro - 4, Impasse Duc de Sainbour

[Marc de St Imberb]

Le Kilimandjaro

Bar discret pour entretiens d'exception.

Marc avait ses entrées dans ce bar d'exception, situé au sous-sol d'un bel immeuble de la capitale. On y fréquentait un groupe restreint d'individus : chefs d'entreprise, chanteurs, écrivains, politiques... Le lieu était propice aux rencontres entre gens de bonne société, aux rendez-vous d'affaires, ou tout simplement aux moments solitaires à déguster un Pic-Saint-Loup 1991.

La carte était fournie et permettait de se laisser aller à d’exquis plaisirs.

Carte

Pour manger :
La petite cuisine du Kilimandjaro est alimentée avec soins par le meilleur boucher du quartier de la Croix d'Argent; vous pouvez ainsi déguster de merveilleuses viandes, de l'agneau de prés salés au boeuf blond choisi sur pied en aquitaine... En ce moment, le chef vous propose :

• Chateaubriand et sa sauce au cognac
• Surprise (bœuf) et sa tomate farcie aux courges
• Gigot d'agneau de Prés Salés (Normandie) à l'ail et aux herbes de Provence, accompagné de sa tapenade d'olives
• Carré de porc, sauce coco

Apéritifs :

• Champagnes
  • Salon 1999
  • G.H.Mumm blanc de blanc Mumm de Cramant
  • Charles Heidsiek Rosé

• Whiskies
  • Chivas Regal
  • Ballantine's 12 ans
  • Caol Ila
  • Bushmill's
  • Tullamore Dew
  • Blanton's
  • Nikka

• Pastis
  • Ricard
  • Casanis
  • Henri Bardouin

• Vermouth
  • Martini rouge
  • Noilly Prat Blanc
  • Cinzanno

• Gin
  • Bombay Saphire

• Cognac
  • Hennessy Very Special
  • Jean Fillioux Grande Champagne

• Vins de garde
  • Madiran (Montus)
  • Chateauneuf du Pape (Charvin)
  • Médoc (Rolland de By
  • Haut-Médoc (Sociando Mallet)
  • Bordeaux (Reignac)
  • Chinon (Croix Boissée)

Vins blancs : voir vins de la semaine.

[Marc de St Imberb]

Marc de St Imberb fut cueilli par des journalistes à l'issue de son déjeuner.

- M. de St Imberb, on parle d'affront concernant votre Ministère désormais réduit et votre titre de Ministre d'Etat qui vous a été enlevé ?

- Affront ? Je ne pense pas, je suis à l'origine de ceci ! Le Président de la République tenait à me décerner ce titre officiel; mais j'avoue qu'après une carrière ministérielle assez longue, ces titres pompeux ne me servent plus à grand chose. Je lui ai donc proposé de nommer un autre membre du gouvernement, ce qu'il a fait en suivant mes conseils. Quand au Ministère de l'Intérieur, il revient à mon ancien directeur de cabinet, que j'ai personnellement conseillé pour ce poste auprès du Premier Ministre. Voilà tout !

[François Bertrand]

Conformément à la réservation organisée par le Secrétariat Général du Palais d'Anthelme, le Kilimandjaro était fermé au public. Seuls les quelques invités du chef de l'Etat avaient accès aux locaux afin de garantir la discrétion des échanges et la sûreté des personnalités politiques du gouvernement. Le service de sécurité de la présidence de la République avait mobilisé ses meilleurs tireurs d'élite dans les bâtiments situés autour et une dizaine de garde du corps sécurisaient les différents accès au restaurant.
Des camions de CRS, assez visibles par les résidents alentours, stationnaient dans chaque rue adjacente à l'impasse Duc de Sainbour pour veiller à ce qu'il n'y ait aucun trouble à l'ordre qui serait susceptible de gêner le dîner. Pas grand monde ne devrait être au courant de toute manière.

Le président de la République arriva sur place, en compagnie du gérant des lieux. On le fit s'asseoir sur une chaise, il ne restait plus qu'à attendre le reste des invités. A savoir Marc Schaft, Edouard Garonne et Anna Sorensen.

"Un verre de Chivas pur s'il vous plaît"

Rien de tel qu'un bon trait de whisky pour se détendre en attendant l'arrivée des convives.

[Édouard Garonne]

Edouard Garonne ne savait pas quoi vraiment penser de sa nomination comme Ministre de l'Intérieur. Certains dans son entourage l'avait averti sur le Président Bertrand qui se trouverait en conflit latent avec St Imberb. Sa nomination au ministère aurait donc davantage à voir avec la volonté d'affaiblir St Imberb que de véritablement gratifier des compétences hors normes. C'était une idée que Garonne n'était pas prête à croire sur parole mais dont il pensait l'existence tout à fait possible. Les jeux de pouvoir au sommet d'un état était des combats impitoyables, tergiversant entre compromis forcés et coups d'éclats politiques. Mais il valait mieux garder un silence sur ses doutes. De toute façon, il avait mieux à faire pour le moment que de se soucier des potentiels combats entre les chefs des grandes factions politiques. La sécurité du pays était comme beaucoup de chose un peu délaissée et il avait des cadavres dans le placard du gouvernement qu'il faudrait évacuer au plus vite au risque de se trouver face à un scandale monumental. Ceci commençait par les problèmes de vandalisme dans le domaine religieux et allait jusqu'au problème de recrutement des jihadistes en Europe.

Édouard entra alors dans le bar. C'était un lieu connu pour être habituellement très vivant mais aujourd'hui, il n'y avait presque personne, à part le personnel et le Président de la République attendant ses invités. Dommage, l'ambiance était véritablement manquante mais probablement que ceci était le cadet du souci des organisateurs. Il s'approcha alors du chef d'état et le salua.

- Monsieur le Président, c'est un honneur de pouvoir être invité en ce lieu par vous.

Les autres ministres n'éaient visiblement pas encore venus.

[Anna Sørensen]

C'est en BMW noir que la nouvelle ministre des Affaires Sociales et de la Santé se présenta devant le Kilimandjaro. Son garde du corps lui ouvrit la porte du véhicule et en l'espace d'un instant elle ne se sentait plus vraiment à sa place. Tout ce protocole qui l'encadrait mais surtout celui qu'elle distinguait déjà autour du Président de la République ne la faisait guère rêver. "La prochaine fois ce sera le vélo pour nous Christophe, de plus vous me remercierez au bout de quelques mois pour les cuisses que vous obtiendrez" lança-t-elle à l'adresse de son gorille qui ne trouvait rien d'autre à y redire.

Anna entra avec discrétion dans l'établissement et salua les quelques personnes chargées de la sécurité du Ministre de l'Intérieur. L'iphone au fond de sa poche sonna, un sms de son conseiller en communication lui rappelant quelques indications concernant le cadre de cette réunion ô combien décisive pour l'avenir politique de la froço-danoise. Elle était une petite nouvelle dans ce bassin de requin et face à l'expérimenté Président Bertrand, on peut vite être désarmé. Mais le manque de confiance en soi n'était pas réellement une caractéristique de Sorensen. Elle aperçut alors Bertrand et Garonne attablés.

"Bonsoir Messieurs, excusez mon léger retard, le ministère est en plein branle-bas de combat."

[Marc Schaft]

C'est épuisé et à cran après une heure et demi passée dans les embouteillages que Marc Schaft arriva enfin devant le Kilimanjaro.
Peu désireux de perdre encore un temps certain à chercher une place de parking, il tendit les clés de sa Golf ainsi qu'un billet de 50 € au voiturier

-Merci, et gardez la monnaie

Marc franchit ensuite le seuil de la porte, balaya la salle du regard, et rejoignit ses collègues ministres ainsi que le Président. S'affala sur un fauteuil, il poussa un soupir

Bonjour à toutes et à tous, veuillez excuser mon retard. J'avais oublié à quel point circuler dans une capitale pouvait être compliqué

[François Bertrand]

Tous les invités avaient répondu présent, le président les salua tour à tour affectueusement avant de déclarer :

"Allez-y, prenez commande, c'est moi qui invite !"

Il fit signe de la main pour qu'un serveur se rapproche :

"Merci pour le Whisky"

Prenant la carte en main, il communiqua aussitôt son choix de plat :

"Pour moi ce sera un gigot d'agneau Près Salés s'il vous plaît. Avec en entrée une salade feta, avec beaucoup d'olives. J'aime les olives!"

Le serveur était prêt à prendre la commande des ministres. Une fois que cela fut fait, François engagea la conversation :

"Bien, je vous ai tous les trois réunis ici pour une bonne raison. Vous formez ensemble une nouvelle génération de personnalités publiques qui représentent l'espoir politique de demain. J'ai personnellement tenu à ce que vous intégriez le gouvernement pour vos qualités respectives et je pense que ce dîner peut être l'occasion pour vous, non seulement de faire connaissance entre vous, mais également de mieux nous cerner chacun réciproquement.
Marc, Edouard, Anna, racontez moi un peu votre histoire. Ce qui a motivé votre engagement en politique et ce qui vous anime comme idéal de société, je vous écoute".

[Anna Sørensen]

- Madame prendra du vin ? Notre sommelier peut vous conseiller certains crus, nous avons un Côte Rôtie 1992...

- Je vous arrête tout de suite, ce ne sera pas du vin pour moi, je vais vous prendre un pinte de votre meilleure bière. Puis pour ce qui est du plat (elle marque un temps d'attente), la surprise et sa tomate farcie aux courges me plairont certainement.

Alors qu'on lui apportait son verre, Anna écoutait attentivement les propos du Président de la République. Il avait l'air à l'aise dans ce genre d'exercice en petit comité, c'était de notoriété publique que Bertrand était un orateur de talent et qu'il était très convainquant. Flattée d'être considérée comme une étoile montante de la vie politique, la ministre prit la parole afin de se présenter:

- Eh bien, je vous remercie pour l'invitation Monsieur le Président. Née à Copenhague, j'ai étudié les sciences politiques avant de travailler dans la presse et l'audiovisuel en tant que journaliste. Par la suite, je suis devenue correspondante d'un média danois en Frôce, puis j'ai été chroniqueuse politique dans les colonnes de Frôce Info Soir. Malgré ma famille bourgeoise, je me suis tournée politiquement vers les idées social-démocrates très présentes dans la société danoise. Mon objectif est de défendre ces valeurs à travers mon engagement. Une sécurité sociale garantie pour tous, une redistribution équitable de la richesse, l'envie d'entreprendre, la transition énergétique, une société progressiste etc. Bref, ce sont des droits mais aussi des devoirs envers son pays que je souhaite promouvoir au sein de la vie démocratique. La société parfaite n'existe pas, cependant, je crois que l'humain doit être au centre des considérations de notre politique et là on tendrait vers un idéal plutôt intéressant.

[Édouard Garonne]

Édouard ne se laissa pas prier de suivre l'invitation du Président. Quand le serveur passa auprès de lui, il lui donna sa commande.

- Pour moi ce sera un grand verre de jus d'orange et un gigot d'agneau de Prés Salés. Je prendrais aussi une salae feta comme entrée.

Il sentit le regard surpris du serveur de ne pas le voir d'alcool mais Garonne s'enfichait de ceci. Qu'il pense ce qu'il veuille. De toute façon, ce n'était pas comme si on avait beaucoup de choix sur la carte. Oh, c'était tous des plats de qualité, sans aucun doute, mais disant qu'ils ne rentraient pas vraiment dans ces coutumes alimentaires. C'est alors que le Président engagea la conversation en leur demandant de lui faire un court résumé sur leur parcours. C'était, pas sans surprise, qu'Anna Sørensen prit la parole en première. Édouard l'écouta avec attention. Cette femme avait tout de la bourgeoise se situant au centre-gauche du spectre politique. Probablement proche du courant socialiste à l'entendre parler sur les beaux principes et les idées. Quand elle termina se présentation, Édouard sentit le regard du Président sur lui et se mit donc à se présenter.

- Je crains hélas que ma biographie soit moins impressionnante que celle de mon estimée collègue. J'ai plusieurs année travaillé dans les services administratives d'une entreprise spécialisée dans l'exportation de produits alimentaires. C'est que par un heureux hasard qu'on m'a offert recemment un poste dans l'administration du Ministère de l'Intérieur et que des là, Monsieur St Imberb m'a offert la chance de devenir son directeur de cabinet. Le reste, je crois que c'est largement connu par les personnes ici présentes, peut être mieux que par moi-même.

Il fit une petite pause avant de continuer.

- En ce qui concerne mes opinions politiques, je ne crois pas aux idées. Ne me comprenez pas mal, je trouve les idées d'égalité et de justice très belles mais elles ne résolvent pas les problèmes auxquels nous allons être confrontés. Depuis un siècle, l’hémisphère Nord de cette planète à conduit une industrialisation si massive et violente,,qu'à l'heure actuelle il n'y a pas une personne pour nier le fait que le rythme et le système économique que nous avons, ne durera pas sous cette forme encore un siècle. C'est peut être pour ça que j'ai accepté l'offre de Monsieur St Imberb. Je pense que nous devrons aujourd'hui mettre les bases pour la société de demain. Lutter contre la thésaurisation et les excès du système financier, créer un espace d'innovation et d'excellence, rendre l’apprentissage général, favoriser les hautes écoles et les écoles polytechniques et développer des énergies alternatives en nous appuyant sur les innovations technologiques faites durant le 20ème siècle pour la transition. Aussi, nous devrons plus tôt ou plus tard nous poser la question de la robotisation de l'économie. Est-ce que l'économie de demain devra être complètement automatisée et que faire pour éviter un chômage de masse si nous optons pour ce choix ? Également, doit le capital financier être détenu par une élite ou un système d'associations et coopérations ? Ce sont des questions qui peuvent paraître lointaines mais si nous ne nous les posons pas aujourd'hui, nous rendrons leur réponse impossible demain.

[Marc Schaft]

Je vais vous prendre un gigot d'agneau accompagné d'un chateauneuf du pape

Marc ne savait par ou commencer

Mon parcours est assez classique, j'ai fait un bac éconoomique avant d'aller faire mes tudes à l'université Paris Dauphine, en cursur CCA. Ce n'est pas le cursus le plus glorieux de cette université mais c'est ce qui me plaisait, et aujourd'hui je ne regrette pas.

J'en ensuite travaillé 4 ans chez KPMG et 3 ans chez Fromentin et associés avant de me diriger vers divers cabinets de conseil indépendants, durant 10 ans. Je suis ensuite resté 15 ans chez Deloitte avant de redescendre en Frôce pour y terminer ma carrière à mon propre compté.

Je suis comme vous savez passionné par l'économie et par le monde de l'entreprise, et c'est ce qui m'a motivé à manifester mon intérêt pour ce ministère.

Marc marqua une courte pause et entama le Chateauneuf du Pape, bienvenu après une rude journée.

Vous savez, j'ai beaucoup de projet pour mon ministère. Je ne suis pas une personne qui souhaite s'engager auprès d'une formation politique en particulier, je veux juste me mettre au service de mon pays en appliquant une politique économique réaliste et qui profite à tous

[François Bertrand]

[HRP : Excusez mon retard, la rentrée a quelque peu réduit mes disponibilités et comme je voulais être exhaustif pour vous répondre... ^^]

Le président de la République avait écouté ses différents interlocuteurs. Pendant qu'ils expliquaient leurs points de vue et témoignaient de leur parcours, il restait concentré et attentif à eux pour ne rien rater. Il voulait en savoir plus pour cerner définitivement ses ministres indépendants. Après que chacun eut finit, il reprit la parole :

"Anna, je dois vous dire que l'intérêt que vous portez en l'humain me fait réagir. Etant moi même franc-maçon, je considère que l'humanisme est la valeur par excellence à défendre dans le monde d'aujourd'hui. C'est d'ailleurs le propre des planches étudiées dans les loges que de s'interroger sur l'avenir de l'Homme, le progrès social et les libertés.

Conjuguer l'envie d'entreprendre avec la garantie d'une protection contre les risques sociaux, parce qu'ils peuvent se présenter à tous à n'importe quel moment, me paraît être la troisième voie par excellence sur le plan économique. En prêtant attention à ce que vous disiez chacun de vous trois, j'ai remarqué que vous vous désintéressiez des étiquettes politiques. C'est pour moi le signe de l'engagement public de demain. Des personnalités, femmes ou hommes, prêtes à contribuer selon leur parcours personnel et leurs compétences à l'effort national pour améliorer les conditions de vie de la collectivité. Sans ramener sans cesse sur la table les lieux communs dits de gauche - comme si ne pas être de gauche revenait à ne pas être sensible à la question sociale"

Après un court moment de silence, accoudé sur la table les mains croisés, François observa le jeune ministre de l'intérieur.

"Eh bien, Edouard, si je ne partage votre point de vue sur les idées en général, je dois remarquer que nous avons les mêmes goûts culinaires"

Il esquissa un sourire décontracté avant de poursuivre :

"Blague à part, je comprends très bien votre raisonnement. Les XIXe et XXe siècles ont été suffisamment longs en terme d'histoire politique et philosophique pour reproduire les vieux concepts inopérants de communisme et de capitalisme dans notre vision du monde d'aujourd'hui. Quand vous dîtes ne plus croire aux idées, c'est, si j'ai bien compris, une façon de dépasser le clivage traditionnel qui nous est imposé dans le monde des idées justement. Et vous faîtes bien de poser au centre de notre discussion les questions liées à l'avenir productif de demain"

S'adressant aux trois personnalités pour témoigner de ses propres convictions, le président ajouta :

"Pour vous dire mon point de vue, selon moi il faut complètement redéfinir les catégories conceptuels sur lesquels nous avons basé notre façon de voir les choses. Revoir la manière de produire, la façon de produire, repenser la question du travail et imaginer de nouvelles formes d'énergies donc nous doter de ressources nouvelles.
Il y a quelques années, avant d'accéder à la fonction présidentielle, j'avais invité les Verts à échanger autour de la question énergétique qui me paraît primordiale. Vous devez le savoir mieux que moi, il est loin le temps où nous faisions le bilan des dégâts causés par l'industrialisation de masse. Il est plutôt venu le moment de se retrousser les manches et d'intégrer l'idée de progrès sur l'appareil productif. Evidemment c'est une chose difficile à faire, parce que cela revient à défendre une révolution industrielle, sociale et intellectuelle. Mais il est nécessaire d'avoir le courage de passer par là pour se prémunir du choc à venir, le pic pétrolier"

Il se tourna à nouveau vers Edouard.

"Dîtes moi Edouard, vous dîtes avoir travaillé dans l'exportation de produits alimentaires. Avez vous le sentiment d'avoir permis la découverte à l'étranger de la culture gastronomique frôceuse, riche de sa diversité ? Je veux savoir, par curiosité, comment fonctionne le domaine de l'import-export entre la Frôce et les pays avec lesquels elle traite.

Il coupa soigneusement son gigot d'agneau en petits morceaux.

"Parlons des sujets économiques. Je me considère personnellement comme hétérodoxe. Je suis autant fasciné par l'initiative privée, la prise de risque de l'homme qui veut créer des emplois et non les quémander, que par le salarié investi dans son entreprise qui se sent utile à produire quelque chose d'unique en développant la marque pour laquelle il se lève tôt le matin, si tant est que le travail n'est pas aliénant ou tayloriste.
Regardez notre ami Marc, il est pour moi l'archétype de l'homme d'affaires qui passe son temps à travailler et ne se pose pas la question de savoir s'il faut perdre son temps en conjectures idéologiques stériles. Il est dans le réel, la proposition concrète. J'en ai connu des entrepreneurs cyniques et orgueilleux qui voient le monde comme une lutte des classes entre ceux qui réussissent et les autres. Une vision binaire qui au lieu d'aider à hausser le niveau, ne fait que dégrader le lien social entre les Hommes avec un grand H"

Il s'essuya le bas du visage avec une serviette avant d'adopter un ton solennel :

"Bien, je vous ai attentivement écouté et observé ces dernières semaines. Je pense que vous êtes tous les trois sérieux et de bonne foi. Donc je me permets de vous annoncer en toute exclusivité ma candidature à l'élection présidentielle de septembre. Selon moi, le travail formidable qui a été commencé mérité de se poursuivre et d'avoir sa chance de déboucher sur de grandes réalisations historiques.
J'ai pris contact avec la gauche, qui est disposée à m'accorder son soutien et avec le RLPN pour proposer à M. Gilbert de continuer tout ce que nous avons accompli. J'attends encore sa réponse, mais cela m'étonnerait fortement qu'il décide de faire cavalier seul au risque de voir ses positions de compromis remises en cause.
J'ai longtemps réfléchi avant de constituer mon équipe de campagne. Mais cette fois ci, mon choix est fait et à vous écouter, il ne fait que le conforter. J'ai besoin de vous, Marc, pour être mon conseiller économique et pour débattre à mes côtés lors de la campagne afin d'expliquer le sens de nos propositions : une économie pour tous, ne laissant personne à la marge, ne montant aucune catégorie sociale contre une autre. J'ai besoin de vous Anna, pour défendre des institutions républicaines mais surtout démocratiques, ouvertes à la parole citoyenne et à la promotion des valeurs humanistes. J'ai enfin besoin de vous Edouard, pour exposer une certaine idée de la Frôce. Une Frôce de paix, mais une Frôce qui affirme solidement ses valeurs et qui aligne son rapport avec le monde de façon cohérente.

Conscient de votre volonté de ne pas figurer dans un clan pour l'instant, j'ai créé, en plus de l'Alternative Démocrate Frôceuse, le Rassemblement pour la Frôce avec mon ami Louis-Damien.
Si Anna par exemple, vous pourriez être intéressée comme nous en avions discuté en privé par la démarche de l'ADF, je pense que Marc et Edouard ne verraient pas d'inconvénient à intégrer le RPF comme association provisoire créée uniquement pour cette élection afin de défendre des idées novatrices"

[Marc Schaft]

Monsieur le Président, vous me voyez flatté d'une telle proposition, cependant j'aimerais avoir des précisions sur votre programme économique, afin que je voie s'il correspond à la conception que je me fais de la Frôce de demain.

Mon soutien dépendra de la nature de vos propositions économiques. J'ai par ailleurs des projets pour la Frôce dont j'ai déjà eu l'occasion de parler en conseil des ministres.

[François Bertrand]

"Le programme économique qui sera le mien est déjà prêt. Je vous l'envoie en recommandé pour que la discrétion sur celui-ci soit préservée, avant publication finale"

Le président pianota sur son smartphone quelques consignes à l'une de ses secrétaires.

"Je veux profiter de votre expertise pour défendre les idées contenues dans le programme que vous recevrez de façon imminente en privé. Puis-je compter sur vous ?"

Il se tourna ensuite vers les deux autres ministres.

"Anna, êtes vous toujours intéressée par l'idée de redonner les moyens au centre frôceux de s'imposer dans la vie politique ?"

Il but une gorgée de son café - oui il aimait prendre du café après un repas - avant de s'adresser cette fois-ci à Edouard Garonne.

"Vous n'êtes pas obligé de me donner une réponse maintenant"