[7 rue de la liberté] Domicile de Valentino Borgia

[Valentino Borgia]

Enfin installé. Valentino n'en revenait pas. Traverser le monde pour revenir à Anglès l'avait épuisé et lui avait pris tout son temps ces derniers jours. Seul. Il était seul désormais. Il faudrait qu'il pense à rendre visite à sa mère à Orgues les Bains ou à son frère Loukas. Ses enfants étaient à Paris, pour y suivre leurs études. Il avait tout le temps possible pour retrouver Anglès, la ville dont il avait été le maire durant de si longues années.

[Edouard de Trance]

Il était 5 heures du matin quand Edouard apprit le retour de Valentino Borgia, par un journal people en continu. Il avait fait sa thèse de sciences politiques sur son parcours politique et notamment sur sa gestion d'Anglès. Il se rappelle encore l'interview qu'il lui avait faite, Edouard avait encore honte des questions ridicules qu'il avait posé. Mais Valentino lui avait semblé si bienveillant qu'il ne pouvait s'empêcher d'être particulièrement heureux qu'il revienne en ce pays, en cette ville.

Poussée par la curiosité il envoya un mail à Borgia :

Monsieur Borgia,
Bonjour,
Vous ne devez pas vous rappeler de moi mais je vous avais interviewé il y a quelques années dans le cadre d'u doctorat. J'ai appris votre retour parmi les frôceux et je tenais à être le premier à vous souhaiter la bienvenue. J'espère que mon mail ne vous étonnera pas trop. Je ne vous avais pas remercié pour votre aide à ma thèse. Et je persiste à croire que votre point de vue à fait basculer ma thèse dans les meilleurs de l'université. Dans tous les cas je vous remercie, et si jamais vous cherchez un conseiller en communication pour vous relancer dans la politique (rien de tel qu'une veine commerçante).
Je vous souhaite une bonne journée,
Cordialement,
Quelqu'un qui vous remercie, Edouard de Trance

Dans un soupir, il referma son ordinateur et regretta déjà ce mail. Advienne que pourra.

[Valentino Borgia]

Très étonné, mais agréablement ému, Valentino décide de répondre sans faire attendre son ancien étudiant :

Cher Edouard,
C'est non sans une certaine émotion que j'ai reçu votre mail ce soir. Si j'ai pu être utile lors de vos études j'en suis comblé, étant donné que c'était le but même de mon ancienne vocation de professeur. Concernant mon retour en politique, cela me paraît encore prématuré. Je servirai mon pays, certes, mais peut être à un niveau plus local. Je ne manquerai pas de vous demander conseil le moment venu d'un retour national, pourquoi pas.
Qu'avez vous fait depuis votre thèse ?
Bonne réception

[Edouard de Trance]

Edouard enfila sa veste cintrée grise, son pantalon slim noir, finit sa 3ème tasse de thé de la soirée puis vit une alerte sur son téléphone. Il avait reçu une réponse. Il prit le temps de la réflexion en enfilant ses docs et finit par répondre :

Bonsoir,
Je suis désolé de vous avoir chamboulé, mon intention n'était pas de cette ordre, quoique. Plus sérieusement, je suis actuellement consultant en communication à l'assemblée, et plus publiquement je rédige quelques billets sur les actions gouvernementales. Et vous, quels sont vos projets ? La mairie ? Associations locales ? Professeur ? J'ose croire que vous revenez pour vous réengagez dans la localité.

Edouard enfila son trench et partit dans la nuit, dans un café où il retrouvait des amis. Mais au fond de lui, Edouard savait que si Borgia était de retour, cela était synonyme de chamboulement et de changement. Un sentiment qui le faisait frissonner d'excitation.

[Valentino Borgia]

Valentino était affalé sur son fauteuil en cuir, une bière à la main. Il aimait feindre l'abattement et se laisser aller à la mélancolie. Il pensait à sa femme, quotidiennement, et cela le dévastait à l'intérieur mais il se complaisait dans cette douleur qui le prenait tout entier à la tombée de la nuit. Une réponse à son mail. Il décida de ne pas répondre tout de suite. Il préférait macérer encore un peu dans son jus morose. Et il était encore trop tôt pour révéler ses projets.

[Valentino Borgia]

Un beau matin, Borgia décida de répondre enfin à Edouard de Trance. Un bon café posé sur son bureau, une chemise fraîchement repassée sur les épaules, il se mit au clavier :

"Monsieur de Trance,
Je remarque que vous disposez d'une certaine visibilité en Frôce de par votre journal Le Frôceux. J'ai pu lire quelques articles signés de votre main et j'avoue avoir ressenti de la fierté à ce qu'un ancien élève se soit tant élevé intellectuellement. Je vous souhaite du succès dans votre entreprise. De mon côté, il est grand temps que je reprenne du service. Pas d'élection nationale en vue mais je souhaite renouer avec mes racines anglésiennes. Le maire actuel semble quelque peu distrait si ce n'est, peut être, endormi sur ses lauriers. Je ne l'en blâme pas réellement, conscient que les sirènes nationales attrapent souvent de leur chant mélodieux les caractères les plus affirmés. Néanmoins, tout est question de conjecture et je suis persuadé qu'il faut à Anglès un homme qui ne rêve à rien d'autre qu'à Anglès. Jadis, la ville fut mon laboratoire libertarien. Rien de péjoratif là dedans. J'avais organisé la ville en quartier, j'avais abattu les murs du tout centralisateur et ma foi, les Anglésiens y avaient trouvé leur compte. En décloisonnant les lieux de décision, les quartiers s'étaient affirmés et avaient pris leur destin en main. Les choses ont bien changé, notamment à cause du passage royaliste puis de la réorganisation de la République.
Les jours qui arrivent seront déterminants.
Borgia V"

[Edouard de Trance]

Il était dans son nouveau bureau à Chouchenn quand il vit ses mails. M. Borgia lui avait répondu, Edouard s'empressa de tapoter sur le clavier.

Bonjour M. Borgia,

Je suis d'abord très touché par vos compliments, j'espère avoir le temps d'écrire de nouveaux articles.
Concernant Anglès, je me doutais que la guerre pour Anglès démarrerait, c'était prévisible, je vous souhaite une bonne chance dans ce rude conflit. En effet, le maire actuel est bien implanté et il est allié à Mme. Von Bertha, et à moi même. Je viens de découvrir ma liaison partisane avec l'actuel maire d'Anglès. Les coïncidences sont parfois d'une rare ironie. Cependant, il est vrai que le maire n'est pas des plus actifs, et c'est mauvais pour les affaires, y compris les miennes. L'hésitation rôde dans mon esprit. Enfin bref.

Monsieur Borgia, je vous souhaite bon courage pour la campagne, d'ailleurs, avez vous des fonds ?

Cordialement,
Edouard

[Valentino Borgia]

J'ai mes propres fonds. Et je ne doute pas que les Anglésiens sauront se mobiliser le temps venu pour faire jouer la démocratie dans cette ville.

[Nick Zelmer]

Nick sonna au domicile de Valentino Borgia. Il avait entendu parler de cette affaire de futur combat politique à la mairie d'Anglès et il voulait en savoir plus.

[Valentino Borgia]

C'est une vieil homme qui vint ouvrir au visiteur. Après s'être présenté comme étant le majordome du propriétaire, il conduisit Nick Zelmer à Valentino Borgia qui l'accueillit :

- Monsieur Zelmer, bonjour. Je ne pensais pas avoir de visite aujourd'hui. Aussi, j'espère que je ne présente pas trop mal. Mon ami m'a dit que vous souhaitiez vous entretenir avec moi ?

[Nick Zelmer]

Ne vous inquiétez pas pour cela. Oui, j'ai entendu que vous étiez en "conflit" si je puis dire pour la mairie d'Anglès? Vous savez je suis un citoyen modèle et s'il y a bien quelque chose que je déteste, c'est l'inactivité de nos dirigeants. Or, c'est le cas du maire d'Anglès, si je n'abuse. Et vous seriez candidat contre lui, c'est ça? Racontez-moi!

[Valentino Borgia]

Je n'ai aucun grief contre le maire d'Anglès, si ce n'est qu'il occupe un fauteuil qui est mien. *rires*
Plus sérieusement, j'ai occupé le poste de maire de cette ville quelques années, précisément avant le coup d'état royaliste. Il me semble que les Anglésiens y ont été réceptifs puisque dans la foulée j'étais soutenu et élu parmi les candidats de l'Alternative Démocrate Libertarienne (ADL), parti dont j'étais le président.
Les chantages de l'extrême droite ont fait tomber mon gouvernement alors que précisément il affichait une activité plus vue depuis de nombreuses années et enregistré des résultats très prometteurs avec une reprise de la croissance significative.
Je suis parti au Costa Rica, suite aux dérives extrémistes de certains qui ont ramené les centristes au pouvoir. Désormais, veuf, je reviens dans mon pays natal.

[Nick Zelmer]

Ah oui d'accord, c'est très intéressant votre histoire, vraiment! Et du coup, vous allez recréer votre parti?

[Valentino Borgia]

Je n'en suis pas encore là, Monsieur Zelmer. Y reviendrai-je un jour...
Pour l'heure, ce qui m'intéresse, c'est de donner du sens à mon engagement. La politique locale a quelque chose de jouissif parce que l'on obtient les retours de la population aussitôt les décisions prises. J'aime ça.