+ Je suis intervenu hier à l'assemblée contre la création du statut de fonctionnaire :
Monsieur Schaft,
J'avoue être assez déçu de vous voir présenter un tel texte aujourd'hui devant la représentation nationale. Je vous croyais visant le futur, je vous découvre admirant ce qui ne fonctionne pas chez nos voisins.
La fonction publique n'a pas pour fonction d'être sclérosée par des postures, elle n'a pas à être immobilisée par des déclarations de principe. Ce présent texte n'apporte rien de bon. Le statut de fonctionnaire, je le comprends lorsque les agents ont besoin de particulièrement d'indépendance et de sécurité autour de leur fonction, comme dans le cas de policiers ou de magistrats, ou encore de militaires. Je ne le comprend pas lorsqu'il est appliqué sans distinctions à toutes les administrations.
Je ne compte pas faire des employés de la fonction publique des variables d'ajustement. Je vois en eux des employés chez qui rien ne justifie un emploi à vie, surtout à notre époque, face au secteur privé. Garantir à chaque personne embauchée par CDI le statut de fonctionnaires, cela implique de très graves conséquences pour l'administration.
Tout d'abord, cela impliquera le fait que les administrations préféreront embaucher en CDD plutôt qu'en CDI, pour les raisons que je vais vous développer tout de suite.
Ces raisons, ce sont les suivantes. Un service public n'a pas à fonctionner comme une entreprise, néanmoins le service public doit aux citoyens et au contribuable le fait d'être performant et efficace. Or, le fait d'embaucher à vie des personnes dont le licenciement sera impossible à obtenir, cela va totalement à l'encontre de ces principes. Les services publics ont besoin de voir clair, ils ont besoin de temps à autre d'équilibrer leurs budgets. En vingt ans, un service public, une administration, cela évolue, cela bouge, cela ne reste pas identique. Or, vous proposez que ce qui fait la base du service public, c'est à dire ses employés, soit inamovible, inchangeable. Ce n'est pas agir en faveur de l'administration.
Vous me direz alors, je le vois venir, que rien ne sera inamovible, que tout le monde pourra être licencié par le biais d'une commission. Mais dans ce cas, quelle est la différence avec le statut privé actuel, si ce n'est la bureaucratie en plus ? Si vous me dite que pour l'administration, rien ne changera, quel est l'intérêt si ce n'est celui de complexifier ? Vous me direz que l'intérêt c'est de valoriser ces emplois. Dans ce cas, passez un décret augmentant le salaire horaire en CDI dans les administrations, créez des tickets restaurants, mettez une semaine de congés en plus, je ne sais pas moi. Je m'y opposerai peut-être, mais ce sera tout de même moins catastrophique pour nos services publics que de créer un statut à part, bureaucratique, flou, dans lequel personne n'aura confiance et qui plongera notre administration dans un immobilisme que personne ne souhaite.
Je vous remercie.